Richard 'Dick'
Corben n'est pas du genre à laisser indifférent, depuis maintenant cinquante ans qu'il incarne certaines des portions les plus charnues de la
fantasy à poil ou à vapeur, ce graphiste et coloriste surpuissant aura inséminé quelques générations de dessinateurs incrédules et captivé des légions de lecteurs condamnés à une puberté éternelle, quitte à faire un gros tri dès le départ: sage zélateur de la ligne claire, de la streamline, du bon goût et des justes proportions passe ton chemin insensé!
Ces excès ne s'adressent pas à toi.
Sa mise à l'honneur à Angoulême il y a deux ans a produit quelques remous (Corbinou ne s'embarrasse point de féminisme et n'est connu que d'un tout petit lectorat de types un peu louches), et a surtout laissé le champ à une volée de rééditions tout-à-fait fréquentables, parmi lesquelles au moins deux attestent l'adoration que Corben entretient pour Lovecraft, qu'il accommode depuis longtemps à sa sauce barbecue:
RAGEMOOROù il est question d'un ténébreux nid d'aigle dont chaque pierre maudite frémit d'une rage antédiluvienne, et dont les tréfonds tiennent captifs d'abjectes secrets.
Le romantisme morbide de Poe, les abominations hors d'échelle d'HPL, les décalages et les carnations de Corben: à boire et à manger.
RATGODOù l'on visite l'arrière-pays vermoulu d'Arkham en compagnie d'un avatar vitupérant d'HPL, qui va devoir jouer des coudes dans une communauté de dégénérés [check] consanguins [check] dangereusement métissés [check].
Assez récent mais délicieusement old school.
Hors des jalons du Mythe, il faut quand même, quand on parle de Corben, citer le phénoménal
Hellblazer: Hard Time qu'il a signé avec Saint Brian Azzarello.
Une apnée dans l'enfer carcéral au pied de la lettre, avec John Constantine en grand incendiaire.
Voilà, il faudrait aussi parler de sa collaboration avec Mignola, mais je garde ça pour une autre fois.